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La « Participation », une voie de 

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Par Bernard Reygrobellet

Président du club Nouveau Siècle

 
 

Fondé en mai 2001 par Philippe Dechartre, ancien ministre du Général de Gaulle et de Georges Pompidou, le Club Nouveau Siècle est un think tank qui vise à organiser une réflexion politique, économique, sociale, culturelle et environnementale à partir des valeurs du gaullisme. Présidé depuis octobre 2006 par Bernard Reygrobellet, le Club Nouveau Siècle a installé au cœur de ses propositions la réactivation de la « Participation » au sens où l’entendait le Général de Gaulle, c’est-à-dire un outil de réconciliation entre le capital et le travail et le vecteur d’une transformation sociale.

La France en crise 

La question qui se pose, dans une économie marchande en crise, est double : le partage des richesses et la place des salariés dans l’entreprise. Alors que nous vivons une détérioration des rapports entre l’entreprise et ses salariés, la « participation » permet de reconstruire ces rapports, comme elle induit des relations nouvelles entre tous les acteurs de la société. Dans une France en crise, l’une des voies du redressement de notre pays, redressement économique, social, culturel et moral, est la réactivation de l’idée même de participation.

La crise que connaît la France est multidimensionnelle et elle est autant culturelle que structurelle. Personne ne prend la pleine mesure de la situation réelle de notre pays : désindustrialisation, délitement de notre système éducatif, faillite de l’Etat-providence, échec des politiques d’intégration, onde de choc des flux migratoires, fracture urbaine, désastre écologique, etc. Longtemps préservée, en particulier lors des Trente Glorieuses, la France subit de plein fouet, comme toutes les économies occidentales, depuis septembre 2008, les effets d’une crise mondiale, crise financière, économique et sociale. L’erreur serait de croire que la crise que traverse la France commence en septembre 2008. Cette crise est le résultat d’un fonctionnement de l’Etat inscrit dans les gènes de la classe politique traditionnelle, à gauche comme à droite. Ce fonctionnement, fondé sur l’augmentation sans fin de la dépense publique et de l’endettement, est arrivé à son terme. Est-il possible, pour l’Etat, de continuer à prélever 1 euro d’impôt et dépenser 1,20 euro, alors qu’il devrait, aujourd’hui, pour un euro prélevé, ne dépenser que 80 centimes d’euro et consacrer 20 centimes au désendettement ? Si l’Etat ne peut pas continuer à assumer son rôle d’Etat-providence dans les mêmes conditions qu’autrefois, il convient de réfléchir sur d’autres solutions, afin de permettre une meilleure répartition des richesses. Parmi ces solutions figure la participation, telle qu’elle avait été imaginée par le Général de Gaulle.
 

La participation, vecteur de la transformation sociale 

Le partage des richesses

La période de reconstruction des années 1950 a permis l’épanouissement d’un monde fondé sur les grands compromis entre l’économie et le social. Le pouvoir politique pouvait décider de l’organisation de la société afin de tendre vers la cohésion sociale, en associant le pouvoir syndical à la décision. La réalité était celle d’un capitalisme maîtrisé, raisonné, régulé, qui prenait la forme d’un défi industriel patriotique. La République avait un double visage, celui que dessinaient les frontières protectrices d’un Etat-nation, économiquement prospère, culturellement homogène, et celui de l’action de l’Etat-providence, qui, ignorant le pouvoir de l’économie, comme dans les pays communistes, augmentait sans cesse la dépense publique. Aujourd’hui, le mode de développement de notre société se caractérise par la disparition progressive du pouvoir de régulation des inégalités par un Etat-providence autrefois affranchi des contraintes de l’économie. Nous ne sommes plus dans la logique économique des années 1960, qui ont vu le triomphe du gaullisme politique adossé à un capitalisme patriotique, dont le développement, à l’abri des frontières, permettait de produire en France des biens de consommation achetés par des ouvriers français. Le jeu de rôles du patronat et des syndicats ouvriers permettait le progrès social, avec une inflation qui entraînait mécaniquement l’augmentation des salaires. L’un des postulats de la pensée gaullienne est qu’il ne peut y avoir de justice sociale sans efficacité économique. En 1945, justice sociale et efficacité économique sont étroitement liées dans les choix qui sont ceux du gaullisme social de l’après-guerre. Le programme du Conseil National de la Résistance (CNR) s’applique d’autant plus naturellement que l’époque ne dissocie jamais la politique, l’économie et la justice sociale. Institué dans l’après-guerre, le financement de notre système de protection sociale provient des cotisations sociales, c’est-à-dire de la taxation du travail. Ce prélèvement sur le travail, qui a permis d’installer le règne de l’Etat-providence, a pu fonctionner dans le cadre d’une économie fermée. Aujourd’hui, la globalisation du travail interdit de raisonner en termes d’économie fermée. La « participation », dans ses mécanismes financiers, permet de repenser le partage des richesses, d’aller vers plus de justice sociale. La « participation », au sens où l’entendait le Général de Gaulle, permet au politique d’agir sur l’économie, sans prétendre abolir le marché ou aller vers une improbable « démondialisation ». Elle est le plus sûr chemin pour aller vers un partage des richesses sans recourir aux vieilles recettes d’un Etat-providence aujourd’hui durablement affaibli. Une première étape suppose une « relecture » de tous les mécanismes financiers de la participation et une réactualisation des dispositifs financiers de l’épargne salariale. Au-delà de l’aspect financier, la « participation » suppose un meilleur partage du pouvoir dans l’entreprise, sans aller jusqu’à la « cogestion ». 

Le partage du pouvoir dans l’entreprise 

La « participation » est aussi un choix politique, car elle suppose un partage du pouvoir dans l’entreprise, afin d’aller au-delà de la simple logique financière. Pour Jacques Godfrain, « l’enjeu fondamental de [la participation] est de changer en profondeur l’esprit de l’économie, de redonner cet esprit d’entreprendre aux salariés et cet état de sérénité au sein de l’entreprise. La construction du viaduc de Millau a été confiée à une entreprise au sein de laquelle l’actionnariat salarié est très présent. Résultat : aucun accident du travail n’est à déplorer ! L’objectif, via l’actionnariat salarié, d’impliquer plus les salariés dans le développement de l’entreprise n’est pas d’être uniquement un levier économique, il vise une notion d’harmonie au sein de l’entreprise. » Historiquement, l’entreprise a été le lieu clos où se jouait la lutte des classes. Cette époque est révolue. L’activité de l’entreprise suppose de partager les responsabilités, afin de rendre plus efficace le fonctionnement de l’entreprise. L’opposition entre dirigeants et salariés appartient à un monde ancien, même si elle existe encore dans le capitalisme financier avide de profits, qu’il convient de distinguer du capitalisme d’entrepreneur. Pour Jacques Godfrain, «  plus de formation, plus d’échanges sont les conditions d’un meilleur dialogue social ». Les actionnaires salariés doivent pouvoir entrer au Conseil d’administration, sans que ne leur soit accordée une place privilégiée. Leur pouvoir est fonction du nombre d’actions détenues. Les salariés actionnaires sont des partenaires importants de l’entreprise. A la fois salarié et actionnaire, ils sont à même de participer aux décisions stratégiques de l’entreprise. On comprend que ce qui se joue, c’est alors une véritable transformation sociale de la société. 

La transformation sociale : l’alliance du capital et du travail

Le Général de Gaulle avait coutume de dire : « En France, il n’y a qu’un seul révolutionnaire, c’est moi ! », ce qui était une manière de répondre aux prétentions des communistes qui s’affirmait comme les seuls défenseurs de la classe ouvrière. La « participation », dans sa philosophie, dépasse les simples enjeux financiers. Historiquement, les premières expériences d’actionnariat salarié apparaissent dans la deuxième moitié du XIXème siècle avec Saint-Simon ou Fourier. Le « Bon Marché » va devenir, en 1880, une commandite simple avec ses collaborateurs et ses principaux employés. Cette évolution historique est théorisé par de Gaulle, afin de transformer la condition du salarié en celle d’associé. La ligne d’horizon du gaullisme est alors une véritable transformation de la condition des ouvriers. Cette révolution sociale a toujours été retardée par le patronat et par les syndicats eux-mêmes. Le XXIème siècle montrera sûrement que le statut de salarié n’est pas l’alpha et l’oméga de la condition humaine. Ce n’est pas non plus le cheminement vers un capitalisme plus équitable. La « participation » a ouvert la voie à la création du statut de « salarié-associé ». C’est cette voie que nous devons continuer à explorer, afin de permettre à la France de maintenir son rang dans l’économie mondiale.

***

L’âge d’or de l’Occident semble s’achever avec la crise des anciens pays industrialisés. Les économies occidentales, que l’on croyait solides, à l’image de l’économie américaine, ne créent plus d’emplois, s’effondrent. L’Occident ne détient plus le monopole du progrès scientifique et technologique. Les pays émergents, on devrait dire « émergés » pour les « BRICA » (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud), se réunissent pour venir au secours de l’Europe. En réalité, il s’agit pour la Chine, l’Inde ou le Brésil de prêter de l’argent à l’Occident, afin que les pays aidés achètent leurs produits. Cette aide, qui correspond à une forme de « baiser de la mort », produira plus de délocalisations et plus de chômage en Europe.

C’est dans son propre fonctionnement que l’Occident doit trouver des solutions à la crise. Un discours de vérité et une action résolue s’imposent pour que l’Europe ne devienne pas un champ de ruines et que disparaissent toutes les protections sociales d’ici 10 à 15 ans. Il n’est pas question d’une simple sortie de crise. Parler de sortie de crise est une facilité de politique politicienne, car nous sommes entrés dans l’ère des crises successives, avec la nécessité, pour un pays comme la France, de s’adapter sans cesse aux défis de la mondialisation sans recourir aux vieilles solutions d’un Etat-providence à bout de souffle.

La « participation » vient se substituer, par ses implications financières pour le salarié, aux vieilles recettes de l’Etat-providence. Mais c’est aussi un véritable projet de société et un projet de civilisation.


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